Une bonne raison pour plonger souvent dans le sud de la Mer Rouge
Souvent lorsque je discute avec des photographes pendant les stages de photo sous-marine, deux questions reviennent invariablement. Pourquoi ne suis-je jamais lassé de mes plongées en Mer Rouge ? Comment réussir à créer de belles photos sous-marines ?
Les réponses à ces deux questions pourtant très différentes sont étroitement liées : un photographe ne peut réussir de belles séries de photos qu’à partir du moment où il connait parfaitement les lieux où il plonge. C’est mon cas pour la Mer Rouge.

La photographie sous-marine : un domaine très complexe
La photographie sous-marine est certainement le domaine photo le plus intéressant pour réaliser des photos créatives et inattendues. En effet, nous sommes peu nombreux à plonger. De nombreuses personnes ont peur de l’eau, ne savent pas nager ou craignent les créatures légendaires des profondeurs abyssales. Il devient alors très facile pour un photographe de montrer des photos inhabituelles qui soulèveront l’enthousiasme d’un public qui n’a jamais eu l’occasion de découvrir les beautés du grand bleu.
Montrer un hippocampe, un dauphin, un requin ou une raie manta, c’est la certitude de surprendre un auditoire non initié.
Mais la photographie sous-marine est pour nous, photographes professionnels, le domaine le plus complexe qui soit. D’une part le temps de plongée est toujours très limité ; pas plus d’une heure pour un plongeur entrainé. D’autre part, le nombre de plongées est souvent limité à 2 ou 3 plongées par jour. Finalement pendant une semaine, le photographe est limité entre 15 et 16 heures de prises de vues. Si on compare à la photographie animalière ou de paysage, c’est vraiment très peu.
D’autre part, un photographe sous-marin doit connaitre les techniques du super grand angle, du grand angle, du rapproché, du gros plan et de la macro. Il doit parfaitement maitriser l’éclairage artificiel. Un photographe terrestre se spécialise souvent en grand angle ou en gros plan et il utilise le plus souvent la lumière naturelle.
Finalement, un photographe sous-marin doit être complet et les temps de prises de vues sont très limités. C’est le domaine photo le plus complexe que nous connaissions.
Connaitre un lieu de plongée prend beaucoup de temps
Si nous tenons compte des critères précédents, il est facile de comprendre qu’un photographe sous-marin dont le seul but est de totaliser le plus grand nombre de destinations dans le monde a peu de chance de réussir à créer de belles séries de photographies. Avec un peu de chance, il réussira certainement à ramener des clichés un peu originaux d’espèces sous-marines très exotiques ou peu connues. Mais est-ce que ces clichés seront de belles créations artistiques et créeront des séries cohérentes ? Nous pensons que non.
Je dois totaliser des centaines de plongées en Mer Rouge. Je connais de nombreux sites depuis le nord dans le détroit de Tiran jusqu’au sud à la frontière avec le Soudan. Pourtant chaque plongée est toujours pour moi un véritable émerveillement. Je ne me lasse jamais du spectacle qui s’offre à mes yeux. Je réussis toujours à réaliser quelques images auxquelles je n’avais pas pensé sur des sites où j’ai plongé des dizaines de fois. Le fait de plonger plusieurs fois sur un même site me permet de bien me placer par rapport à la lumière et de réaliser de meilleures compositions.
Pourtant, j’adore voyager et aller découvrir de nouvelles régions. Lorsque cela se produit, pour un premier voyage, je choisis toujours une destination où toutes les plongées s’effectuent depuis le bord. Ainsi je peux me familiariser avec l’environnement, les espèces et les conditions. En plongeant plusieurs fois au même endroit, je suis certain de capter l’âme de la région et réaliser de belles photos.
Les meilleures plongées restent celles depuis les plages
Les plongées depuis les bords de la plage sont certainement les meilleures en Egypte. Les croisières et les plongées en « Daily » depuis un bateau ont le grand inconvénient de toujours nous faire plonger aux mêmes heures. Le rythme sur un bateau est indispensable car nous ne sommes pas seuls. L’équipage doit s’occuper du gonflage des bouteilles ; le cuisinier doit préparer les repas à des heures fixes. Toutes ces règles élémentaires de la vie sur un bateau ne permettent pas à un photographe de choisir ses heures de plongée pour bénéficier des meilleures heures : surtout celles du matin. Combien de fois ai-je dû plonger aux aurores alors que le soleil n’était pas encore levé juste pour avoir le petit déjeuner à 7 heures ? J’ai gâché un très grand nombre de plongées photo avec des ambiances magnifiques alors que si nous avions attendu 30 minutes, tout aurait été différent.
Le sud de la Mer Rouge possède un récif extraordinaire qui s’étend depuis Marsa Alam jusqu’aux Fury Shoals. Il porte le nom de « tombant de Marsa Alam ». C’est un immense tombant qui longe la côte. La profondeur est suffisante pour les tempêtes n’abîment pas les coraux qui abritent toutes les espèces de poissons coralliens et un nombre incroyable de crustacés. Il est possible de plonger sur ce tombant depuis un certain nombre de plages.
C’est dans cette région que j’ai certainement réussi mes plus belles photos de la Mer Rouge ; et ce pour deux raisons. Je peux plonger à l’heure que je souhaite sans aucune contrainte et je peux plonger au même endroit autant de fois que je le veux.
Changer de thème à chaque plongée sur un même site
Lorsque je plonge depuis le bord sur cet immense tombant, je n’aborde jamais un même site de manière unique. Je change plusieurs fois d’objectif pour réaliser des compositions différentes. Le changement d’heure de plongée et le changement d’objectif me permettent d’avoir un très grand nombre de combinaisons pour réussir des photos totalement distinctes.
Finalement
Cette technique de plonger de nombreuses fois sur un même site mais en variant la technique de prise de vue n’engage que moi. La connaissance des lieux et la répétition des plongées sont le seul moyen que j’ai trouvé pour réaliser de belles photos artistiques. Il est très rare lorsque je plonge pour la première fois sur des nouveaux sites inconnus, que je réussisse des clichés intéressants. C’est pour cette raison que les plongées depuis le bord dans le sud de la Mer Rouge sont pour moi un véritable paradis.

